20h12 CET
26/11/2024
Une décision sur un éventuel non-lieu pour Hugo Auradou et Oscar Jegou, les deux rugbymen français inculpés de viol aggravé en Argentine il y a près de cinq mois, a été mise en délibéré mardi. L'attente ne devrait pas dépasser deux à trois semaines.
A l'issue d'une deuxième journée d'audience à huis clos au pôle judiciaire de Mendoza (ouest), les avocats des parties ont indiqué à la presse que la juge Eleonora Arenas, qui présidait les débats, a remis sa décision à plus tard. Ils l'ont même invitée à "prendre son temps", ont-ils dit.
La juge "décidera du résultat, et prendra (les) quelques jours nécessaires. C'est un cas compliqué", a déclaré Rafael Cuneo Libarona, avocat des joueurs. Elle "n'a pas dit" combien de temps elle prendrait pour rendre sa décision, a-t-il précisé. "Elle doit tout analyser. (...) Qu'elle prenne son temps."
Selon une source judiciaire à Mendoza consultée par l'AFP, la juge a jusqu'à 15 jours ouvrables pour rendre sa décision.
Après les exposés lundi du parquet, qui a requis le non-lieu, c'est-à-dire l'abandon des poursuites contre les joueurs, puis de leurs avocats, c'est Natacha Romano, avocate de la plaignante, une Argentine de 39 ans, qui plaidait mardi.
"Nous avons demandé le rejet total (du non-lieu), arguant avant tout qu'il y a des preuves de production (du délit), et qu'il faut continuer d'enquêter", a déclaré Me Romano à la presse à l'issue de l'audience.
Sa cliente "souhaitait être présente (à l'audience) mais son état de santé ne l'a pas permis", sur la base de recommandations psychiatriques, a-t-elle ajouté. Elle vit "un terrible mélange de sensations dans cette affaire", mais demeure "convaincue de sa vérité".
Me Romano a dit avoir demandé à la juge "qu'elle prenne tout le temps nécessaire", notamment pour "écouter dans leur totalité les 23 messages audios" figurant au dossier, entre la plaignante et une amie en particulier. Dont certains avaient fuité dans la presse.
- Versions radicalement opposées -
La défense des joueurs estime que ces échanges, survenus peu après les faits, trahissent l'existence d'un consentement, ce que conteste fermement celle de la plaignante.
Me Romano a dit "avoir confiance dans l'évaluation" de la juge Arenas, dont elle avait pourtant demandé la récusation, une demande finalement déboutée.
Me Cuneo Libarona a pour sa part estimé que la défense des joueurs a "pas à pas démontré l'innocence" de MM. Auradou et Jegou. "Ce délit n'a pas existé, nous n'avons aucun doute", a-t-il insisté, en raison de "l'existence de consentement", mais aussi de "la quantité de contradictions" de la plaignante.
"Il faut protéger les femmes, celles qui ont réellement été agressées" sexuellement, s'est-il emporté. Pas une "aventure judiciaire comme ce dossier".
Depuis près de cinq mois, Hugo Auradou et Oscar Jegou, 21 ans, sont inculpés de viol aggravé car commis en réunion, pour des faits présumés survenus dans la nuit du 6 au 7 juillet dans un hôtel de Mendoza, où le XV de France venait de jouer un test-match contre l'Argentine, suivi d'une "troisième mi-temps".
Tous deux affirment depuis le début que les relations sexuelles avec la plaignante, rencontrée en boîte de nuit, étaient consenties et sans violence.
L'avocate de la plaignante a dénoncé en revanche un viol avec "violence terrible", dans une affaire qui a vu s'opposer deux versions radicalement opposées des faits, hormis une convergence sur la réalité des actes sexuels et d'un contexte alcoolisé.
Rendre la justice "est difficile quand l'un dit blanc et l'autre dit noir", a commenté Me Cuneo mardi.
Revenus en France début septembre après le feu vert de la justice argentine - le parquet estimait alors que l'accusation avait "perdu de sa force" -, MM. Auradou et Jegou ont repris le cours de leur carrière professionnelle en Top 14: dès octobre pour Auradou avec Pau, novembre pour Jegou avec La Rochelle. Tous deux ont joué le week-end dernier.
Mais pour un éventuel retour en équipe de France, le président de la Fédération Florian Grill a été très clair en affirmant qu'ils ne rejoueraient pas "tant qu'il n'y a pas de non-lieu".